Le Conseil d’Etat refuse de contraindre l’Etat français à agir pour que les parents retrouvent leurs enfants nés en Ukraine

Par ordonnance du 17 mai 2020, le Conseil d’Etat a rejeté la demande de Karine et Thierry qui demandaient à voir le Ministère des Affaires Etrangères contraint de rédiger la note verbale qui leur aurait permis d’entrer en Ukraine pour aller chercher leur petite fille âgée maintenant de moins d’un mois.

Il demeure donc impossible pour les parents français ayant eu, notamment, recours à une gestation pour autrui dans les strictes conditions légales de l’Ukraine, d’assister à la naissance de leurs enfants (dont ils sont les seuls parents légaux au sens de la loi ukrainienne) et de les recueillir.

N’oublions pas que le scandale dont les médias du monde entier s’emparent, à savoir le regroupement d’une 50 aine de nouveau-nés dans une salle d’hôtel d’Ukraine en attente de leurs parents, est le fait de certains pays européens, la France en tête !

En raison de la pandémie de Covid-19, l’Ukraine, comme la majeure partie des pays européens, a fermé ses frontières, ne permettant plus l’accès à son territoire aux étrangers depuis le milieu du mois de mars 2020. Elle a toutefois prévu certaines dérogations dont celle de présenter par l’intermédiaire de son Ministère des affaires étrangères une note aux autorités ukrainiennes expliquant le trajet à accomplir par les parents pour arriver en Ukraine et la raison justifiant cette entrée sur le territoire ukrainien.

De nombreux pays ont réalisé cette note pour leurs nationaux concernés et ceux-ci ont pu rapidement retrouver leurs enfants (L’Irlande, la Suède, Israël, le Royaume Uni, l’Australie …) après une période de quarantaine.

Le ministère des affaires étrangères français, d’abord sollicité directement par de nombreux parents d’intention, est resté muet pendant une dizaine de jours, laissant les parents dans une totale incertitude alors même que les enfants naissaient en Ukraine.

Sur demande insistante de notre cabinet à l’ambassade de France à Kiev et au ministère des affaires étrangères, il fut alors répondu aux parents le 18 avril 2020 qu’il n’était pas possible d’envisager une dérogation à l’entrée sur le territoire ukrainien, sans plus de précisions et au mépris de la réalité.

La France, pour des raisons donc inexpliquées officiellement, contribuait à empêcher la réunion des parents et de leurs enfants et contraignaient dans le même temps les cliniques de fertilité ukrainienne, à trouver urgemment des solutions de garde de ces nouveaux nés, alors même que leurs identités ne pouvaient être établies en l’absence de leurs parents, alors même que pour certains, des interventions médicales d’importance devaient être prises.

Saisis par Thierry et Karine sous la forme procédurale d’urgence, le référé-liberté, le juge du Tribunal administratif de Paris rejetait leur demande le 30 avril 2020, au motif d’une part :

  • que le refus du Ministère des affaires étrangères n’était pas détachable de l’exercice des pouvoirs du gouvernement dans la conduite des relations diplomatiques et devenait par ce fait insusceptible de recours;
  • qu’en tout état de cause la condition impérative d’urgence à juger n’était pas remplie puisque le nouveau-né était pris en charge dans une « pouponnière » dans des conditions satisfaisantes (!).

Dans les débats devant le juge administratif, le Ministère des affaires étrangères en était venu jusqu’à nier l’existence même de la dérogation spécifique mise en place par l’Ukraine, au mépris de toutes les évidences.

Le Conseil d’Etat saisi sur appel des parents le 4 mai 2020, a repris exactement la même argumentation que le juge administratif de première instance, sauf en ce qui concerne l’urgence qu’il n’a pas daigné analyser.

Aucune analyse non plus, ni surtout de contradiction, sur la violation de nombreuses libertés fondamentales(dont le respect de la vie privée et familiale, le droit de l’enfant à être élevé immédiatement par ses parents et celui de disposer d’une identité à sa naissance, mais également le droit à l’octroi d’un recours effectif) générée par le refus de la France d’établir la note sollicitée par l’Ukraine,

Les français concernés se retrouvent donc toujours sans possibilité de retrouver leurs enfants, lesquels sont privés de l’affection essentielle dont le nouveau-né a besoin pour un développement personnel normal, du fait de leur Etat.

Une situation qui pose à ce point difficulté que Lioudmyla Denysova, médiatrice en charge des droits humains auprès du Parlement ukrainien, a, le 15 mai 2020, attiré l’attention de ses autorités pour résoudre la difficulté. Elle estime à cette date le nombre des enfants en attente de leurs parents dans les différents centres de fertilité ukrainiens à une 100 aine.

Une solution est actuellement recherchée par l’Ukraine pour permettre à tous ses parents de retrouver leurs enfants, à défaut de respect par la France du dispositif pourtant simple qu’elle avait mis en place.

Dans l’attente, Karine et Thierry n’ont jamais pu jusque là, porter dans leurs bras leur enfant, ni l’entourer de l’affectation que cette petite fille mérite comme tout enfant.

Presse et médias internationaux :

https://apnews.com/4527b48f925c9fae552bdc65683236ac

https://www.bfmtv.com/international/coronavirus-la-fermeture-des-frontieres-empeche-les-parents-d-enfants-nes-de-gpa-de-les-recuperer-1913928.html

https://globalnews.ca/video/6953807/covid-19-surrogate-babies-stranded-by-closed-borders?fbclid=IwAR251fuMja3_2BUadbTKCrME69Q6_OV5H6lvGL_NSPLd44i1KnuV1RKwQZY

About the author

Catherine CLAVIN a prêté serment auprès de la Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE le 3 janvier 1996. Titulaire d’une maîtrise « Carrières Judiciaires » et d’un diplôme universitaire en Sciences Pénales et Criminologie, elle a tout d’abord exercé sa profession en droit pénal et en droit civil général. Ses compétences s’orientent vers le droit du travail, de la Sécurité Sociale et le droit pénal du Travail ainsi que vers le droit de la famille, de son patrimoine et du divorce.
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